La folle semaine des Primeurs, c’était la semaine dernière à  Bordeaux. La « Crazy Week » est LE rendez-vous incontournable des dégustateurs internationaux venus goûter et noter le millésime 2010 en cours d’élevage. C’est ainsi que des courtiers, négociants, cavistes, importateurs, acheteurs passionnés et journalistes de tous pays se sont retrouvés toute la semaine dernière dans le vignoble bordelais.

Primeurs Bordeaux 2011 - Carnets de Dégustation

En berlines noires ou taxis, naviguant de châteaux en châteaux un verre à  la main, carnet de notes dans l’autre et le crachoir jamais loin, tous étaient fin prêts pour déguster le dernier millésime. Chacun sa technique de préparation. La Master of Wine Jeannie Cho Lee, seule dégustatrice asiatique à  détenir ce titre prestigieux, avoue appliquer une mousse au fluor sur ses dents avant de se coucher trois nuits avant le début des dégustation mais après une journée à  goûter entre 100 et 200 vins, si vous ne paradez pas lèvres noires et dents grises, c’est signe que vous n’avez pas bien travaillé.

Primeurs Bordeaux 2011 - Château Malartic-Lagravière
Primeurs Bordeaux 2011 @ Château Malartic-Lagravière


Les dégustations débutent donc avec les vins de l’AOC Pessac-Léognan au Château Malartic-Lagravière, situé au sud de Bordeaux. Réputés originaux et élégants grâce aux sols de Graves de l’appellation, ils ont aussi la particularité de produire des vins blancs qui se goûtent en premier « pour se faire le palais ». D’une belle qualité cette année, on retrouve bien le fruité du sauvignon et le gras du sémillon, les deux cépages assemblés dans ces vins blancs de Bordeaux avec une bonne prise de bois. Pour les rouges, c’est plus compliqué. Restée sur des souvenirs de dégustation du millésime 2009 charmeur, facile, exubérant et fruité -très nouveau monde- le millésime 2010 est plus difficile à  déguster, voire même éprouvant. Pour cause, sa structure acide et tannique élevée râpe le palais pour découvrir au final un millésime proche du bordelais « classique », annonciateur d’un grand vin de garde. Cette première approche des Primeurs laisse perplexe et intrigue, très curieuse d’aller déguster d’autres appellations.

John Salvy
John Salvy en plein travail


Mais avant de partir, déjeuner au Château Malartic-Lagravière car traditionnellement le château qui reçoit les dégustateurs est aussi chargé de les nourrir. Chaque année, c’est le «tuyau» que s’échangent les dégustateurs locaux : « oà¹-va-t-on-déjeuner » ? Après le foie gras sur pain Poilâne proposé à  Smith Haut Lafitte l’année dernière, c’est la tarte au citron meringuée de Malartic-Lagravière qui restera dans les annales. A noter également la gentillesse de la famille Bonnie qui nous a permis de (re)découvrir les élégantes notes poivrées et torréfiées du millésime 1990 du Château, servi en magnum lors du déjeuner. Plaisir également de croiser le propriétaire d’un Cru Classé de Graves parmi l’invasion de chemises à  carreaux caractéristiques du bordelais : « Ah formidable ce déjeuner, depuis que je vous ai vu, je dis à  tout le monde d’aller sur TWISTER, euh TWITTER ». Me voilà  rassurée, les bordelais sont sur la bonne voie.

Jean-Jacques Bonnie - Château Malartic Lagravière
Jean-Jacques Bonnie – Château Malartic Lagravière


Direction ensuite la dégustation du Cercle Rive Droite à  l’hôtel Grand Barail, St Emilion. Une autre rive, un autre terroir, les échantillons semblent très murs, sur l’extraction, l’alcool, très tanniques, un autre style… Impossible de s’attarder à  cause de la chaleur prégnante sous le chapiteau, les impressions mitigées sur les vins seraient-elles influencées par ces conditions de dégustation ? Cela dit, quelques petits coups de cœurs avec le Clos Dubreuil de Benoit Trocard, riche en fruit et densité tannique, un futur grand à  attendre ou, pour ne pas parler que de rouge, le Clairet gourmand de la famille Courselles du Château Thieuley.

Primeurs Bordeaux 2011 @ Cercle Rive Droite
Primeurs Bordeaux 2011 @ Cercle Rive Droite


Benoit Trocard - Clos Dubreuil
Benoit Trocard – Clos Dubreuil


Sylvie Courcelles - Château Thieuley
Sylvie Courselles – Château Thieuley


Alors que penser après cette première approche du millésime 2010 chez les Graves et quelques représentants de la Rive Droite ? 2010, « c’est plus grand mais moins sexy, moins excitant que 2009. Il faudra l’attendre ! Ce n’est pas bon pour les spéculateurs » explique René Gabriel, influent acheteur Suisse. Effectivement c’est moins sexy que 2009, plus complexe le bougre ne se laisse pas déguster facilement. Mais force est de constater que 2010 rassemble tous les signe d’un grand millésime de garde. Plus costaud que 2009, d’une acidité franche, d’une bouche dense, plus riche au palais, il semblerait que la différence entre 2009 et 2010 ne soit pas une question de qualité mais de style, tendance à  confirmer avec les prochaines dégustations dans le Médoc.

Primeurs Bordeaux 2011

Hélène Worldwine

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